Le 22 septembre 2002, le peuple suisse refusait la
Loi sur le marché de l’électricité (LME), notamment grâce à
l’engagement de Pierre-Yves Maillard et Daniel Brélaz, mais aussi
de l’Union syndicale suisse (USS). Suite au rejet de la LME, une
commission d’experts (dite « ELWO ») a élaboré un
compromis approuvé par les principales forces concernées. Ce
compromis portait sur l’adoption d’une Loi sur
l’approvisionnement en électricité. Cette loi été approuvée
au Conseil national le 23 mars 2007 par 167 oui et 27 non (23
UDC, 1 PS et trois « à gauche toute »). Au Conseil des
Etats, le texte a été approuvé par 41 oui et 1 abstention. Il
n’a pas fait l’objet d’un référendum et devrait entrer en
vigueur au début de 2008.
Le
volet réseau et approvisionnement en électricité
Ce compromis accepté par les représentants de
l’USS au sein de la commission ELWO incluait notamment les points
suivants :
- durant
les 5 premières années, pas de libéralisation pour les
clients consommant moins de 100 MWh par an ;
- référendum
facultatif avant la deuxième étape (libéralisation totale) ;
- définition
très large des coûts du réseau permettant de dégager des
moyens financiers pour entretenir et investir.
A chaque étape des délibérations, des représentants
de la droite dure ont tenté d’écorner le compromis. Avec
d’autres, je me suis battu pour le faire respecter. La menace
d’un second référendum, brandie par l’USS, a permis de ramener
la majorité à la raison, même si la partie ne s’est achevée
qu’en conférence de conciliation.
Lors du premier débat, j’ai réclame l’étatisation
du réseau électrique, car il s’agit d’un monopole naturel, et
à ce titre, il serait contraire à la logique économique de le
privatiser. Bien qu’ayant échoué au plénum du Conseil
national, cette idée a finalement percé au sein de la Commission
du Conseil des Etats. En coulisses, je me suis fortement engagé
pour que cette idée aboutisse aux Etats, puis au sein du Conseil
national. Finalement, le résultat suivant a pu être ancré dans la
loi :
- la
société nationale de réseau regroupe l’exploitation et
surtout la propriété de toutes les lignes de transports à très
haute tension 220 et 380 KV ;
- les
actions de cette société doivent être majoritairement en main
des cantons et des communes, directement ou indirectement. Il
existe un droit de préemption pour les cantons et les communes.
La privatisation du réseau de transport est donc rendue
impossible.
- La
cotation en bourse de ces actions est interdite, ce qui limite
la pression au rendement à court terme.
Cela représente à mon sens une sensible amélioration
du compromis ELWO, puisque les grands producteurs ne pourront plus
profiter des insuffisances du réseau, voire les maintenir
artificiellement, pour imposer des conditions léonines de ventes
aux distributeurs locaux et aux consommateurs.
Encadré:
bilan du volet de l’organisation du secteur électrique
Une régulation du commerce de gros à
place d’un vide juridique
On peut dire qu’en Suisse la libéralisation
ne concernera que l’achat d’énergie (=1/3 du prix final).
Dans une première étape, seule la moitié du marché (gros
clients >100MWh/an) sera libéralisée. Pendant cette première
étape, un monopole légal est établi pour les petits
clients, à la place du vide juridique actuel consécutif à
la décision du Tribunal fédéral dans l’affaire
EEF/Migros. En comparaison du non-droit actuel,
l’instauration d’une autorité de régulation forte et indépendante
offrira de meilleures garanties en matière de sécurité de
l’approvisionnement et de lutte contre les abus de position
dominante
Le passage à une libéralisation pour tous
les clients dans 5 ans sera soumis à un référendum
facultatif :
- si le peuple (voire le Parlement) refuse
cette libéralisation totale après 5 ans, le monopole légal
pour les petits clients sera maintenu sans limite de temps ;
- si la libéralisation pour touts les
clients devait être acceptée dans 5 ans, il sera instauré
un « modèle d’approvisionnement garanti »
(MAG) aux prix régulés par l’Etat. A moins qu’ils ne
décident explicitement d’aller sur le marché, les
petits clients resteront dans le MAG et ne changeront pas
de fournisseur. Selon toute vraisemblance, il ne se
constituera quasiment pas de marché de détail (car cela
n’est intéressant ni pour les ménages, ni pour les
fournisseurs).
Il n’y aura pas de libéralisation du
transport et des « services système », c’est à
dire de l’organisation, du transport et de l’énergie de réglage,
qui représentent 2/3 du prix final:
- la loi stipule que les cantons octroient
des monopoles régionaux de distributions à des sociétés
électriques ;
- la loi stipule que le réseau de
transport est un monopole aux mains de la société
nationale de réseau, qui devra être majoritairement en
main des collectivités publiques. Cela exclut la
privatisation de cette infrastructure stratégique
(actuellement, cette infrastructure est à 85% en mains
publiques).
La loi ne traite pas de la question de la
propriété des réseaux de distribution (hors réseau de
transport) et des centrales de production. Les entreprises
restent en main des propriétaires actuels, c’est à dire
pour l’immense majorité (>90%) les cantons et les
communes. Pour empêcher la privatisation des installations de
production et de distribution, il faut donc être attentifs et
agir au plan communal et cantonal.
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Le
volet énergies renouvelables : un saut quantique
La modification de la loi sur l’énergie adoptée
à l’occasion du débat sur l’approvisionnement en électricité
représente un saut important pour les énergies renouvelables. Un
montant de 320 millions de francs par an sera mis à disposition
pour encourager la production d’électricité à partir de sources
renouvelables : hydroélectricité, éolien, solaire, biomasse
et géothermie. Cette somme sert à garantir un prix d’achat de
ces énergies couvrant les coûts. Ainsi les producteurs, qu’il
s’agisse de communes, d’entreprises privées ou d’individus,
ont la garantie que le courant issu de leur installation sera racheté
à un prix équitable. Cela permet l’obtention des crédits
bancaires nécessaires au démarrage des projets.
L’essentiel du mérite de l’introduction de ce
système revient à mon camarade Rudolf Rechsteiner (PS – BS). Il
a réussi l’exploit de créer une majorité pour introduire ce
dispositif et assurer le financement. Ma contribution fut
surtout de l’aider à réunir cette majorité en convainquant le
plus grand nombre possible d’élus romands de tous bords
politiques. J’ai en outre imaginé un système qui permette de rétribuer
l’électricité solaire malgré son prix encore relativement élevé.
Ce dispositif couple l’augmentation du volume financier réservé
au photovoltaïque à la baisse de ses coûts. Cela a permis de
dissuader le Conseil des Etats d’exclure de facto l’électricité
solaire, comme il l’envisageait dans un premier temps.
No de dossier de la Loi sur l’approvisionnement
en électricité et des modifications de la Loi sur l’énergie :
04.083
Encadré:
la rétribution d’injection couvrant les coûts introduit
dans la loi sur l’Energie
Seul le KWh effectivement produit est rétribué
Ce système ne finance que le KWh
effectivement injecté dans le réseau. Ainsi, le bénéficiaire
est obligé d’être performant. C’est une différence
fondamentale par rapport aux subventions à
l’investissement, où l’Etat payait un montant forfaitaire
au moment de la construction, sans garantie que
l’installation fonctionne effectivement.
Chaque année, les tarifs de rétribution
sont ajustés à la baisse, pour tenir compte du progrès
technologique et des gains d’échelle dus à
l’industrialisation. Dès lors, il est intéressant
d’investir au plus vite, ce qui provoque un boom, et les
gains d’échelle qui vont avec, rendant possibles les
baisses de prix.
Le système est financé par une surtaxe sur
l’énergie qui pourra, à plein régime, s’élever à 0,6
centimes par KWh (soit environ 3% du prix final payé par les
ménages).
Selon les estimations les plus restrictives,
le montant de 320 millions par an permettra d’augmenter en
20 ans la production suisse d’électricité d’origine
renouvelable de 5,4 TWh en valeur annuelle. Cela représente
plus de 10% de la consommation actuelle. C’est un pas
important pour se passer du nucléaire et du pétrole.
Pour la suite, il s’agira de renforcer et
d’affiner le dispositif, et d’étendre son application à
l’étranger, en le couplant à des contrats d’importation
à long terme.
Un système qui a fait ses preuves.
Ce système a permis de déclencher un véritable
boom des investissements dans les énergies renouvelables dans
de nombreux pays européens. En Allemagne, il a permis en 5
ans de passer de 1% à 6% la part de l’électricité éolienne
dans la production globale. A titre d’illustration, au nord
de l’Allemagne, la rétribution du KWh d’électricité éolienne
pour des nouveaux contrats d’injection a baissé à 9
centimes, ce qui signifie que cette technologie est sur le
point d’atteindre le seuil de rentabilité (en comparaison
des technologies traditionnelles).
La production éolienne croit actuellement
d’environ 25% par an à l’échelle mondiale. Elle a décuplé
en 10 ans. En 2006, on a installé 15 GW de puissance éolienne
dans le monde, soit l’équivalent de la puissance de 15
grosses centrales nucléaires. En tenant compte de la météo
réelle, la production effective d’énergie de ces nouvelles
installations représentera environ celle de 2 à 3 de ces
grosses centrales nucléaire tournant 24h/24h pendant 365
jours par an.
Le même dispositif permet à l’électricité
solaire de faire des progrès encore plus considérables, même
si elle part d’un volume plus bas et de coûts plus élevés. |
Installation
de production de biogaz dans la zone agricole
Parallèlement à l’introduction de la rétribution
d’injection couvrant les coûts, j’ai participé à une petite révision
de la Loi sur l’aménagement du territoire. Il s’agissait pour
l’essentiel d’admettre que les installations de production d’énergie
à la ferme étaient conformes à la zone agricole. Cela permet aux
agriculteurs d’investir dans la production d’énergie sans
complications administratives, pour autant que la biomasse méthanisée
ou fermentée vienne des environs immédiats, afin d’éviter les
transports. Accessoirement, il s’agissait d’assouplir les
dispositions relatives à l’agro-tourisme.
En exerçant la fonction de rapporteur sur ce
dossier, j’ai contribué à le faire passer sans qu’il ne
tangue, c’est à dire sans que les milieux économiques ou
immobiliers ne parviennent à surcharger la barque, ce qui aurait
rendu la modification négative pour l’environnement.
No de dossier : 05.084
RN, août 2007
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Bilan
et perspective 2004-2007 (téléch. le pdf complet)
Contenu de cette page
1.
Le volet réseau et approvisionnement en électricité
Encadré: bilan du volet de l’organisation du secteur électrique
2.Le volet énergies renouvelables : un saut quantique
Encadré: la rétribution d’injection couvrant les coûts introduit dans la loi sur l’Energie
3.Installation de production de biogaz dans la zone agricole
Les chapitres du bilan
Introduction
1) Lutte
contre le réchauffement climatique et affranchissement des énergies
fossiles
2) Approvisionnement
en électricité et production d’électricité d’origine
renouvelables
3) Qualité
de l’air, lutte contre le bruit et divers
4) Transports
5) Justice
fiscale
6) Modernisation
sociale et égalité des chances
7) Institutions
et territoire
8)
Europe
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