|
Conseil national 13.12.2016
Non à l'initiative « pour la résurrection du secret bancaire pour la fraude fiscale » L’initiative populaire dont
nous discutons aujourd’hui porte un titre erroné (15.057) : Elle aurait dû en réalité
s’appeler « Initiative pour la résurrection du secret
bancaire pour la fraude fiscale ». En allemand «Steuerhinterzeihungsgeheimniswiederauferstehungsinitive »,
en abrégé « Wiederaufersteungsinitiative ». Pourquoi ? Cette initiative
n’a qu’un seul objectif, retourner à la situation de l’avant
2009, lorsque le secret bancaire protégeait efficacement la fraude
et l’évasion fiscale. C’est clairement une mauvaise
idée : Premièrement parce que protéger
les fraudeurs signifie que les contribuables honnêtes, ici comme à
l’étranger, payeront plus d’impôts que nécessaire. Deuxièmement parce les banques
ont fait un immense travail pour se libérer de l’argent non déclaré
au fisc. D’abord de l’argent étranger, puis maintenant, de
l’argent détenu par des Suisses. Rien ne sert de se voiler la
face : les banques ne sont pas engagées complètement
volontairement dans ce processus. Mais au nom du groupe socialiste,
j’aimerais attester aujourd’hui que des progrès importants ont
été faits, et ceci est à l’honneur des banques suisses. Désormais,
les banques considèrent que d’héberger des avoirs non déclarés,
quelques soient leur origine, constitue un risque pour leur
business. D’ailleurs, sans surprise, l’Association suisse des
banquiers considère que cette initiative, tout comme d’ailleurs
son contre-projet, sont nuisibles pour la crédibilité, la probité
et le développement de notre place financière. Troisièmement parce que ce dont
les banques ont besoin, c’est de règles du jeu clair : la fraude
fiscale n’est pas tolérée, et les fraudeurs ne peuvent pas
abuser des banques pour cacher leur argent. Aujourd’hui, les
banques ne veulent plus protéger les fraudeurs, les banques
souhaitent être protégées des fraudeurs. Damit Herr Matter das versteht,
sage ich es auf Deutsch: Heute wollen die Banken nicht mehr die
Steuerhinterzieher schützen, sondern vor den Steuerhinterziehern
geschützt werden. Zu recht. La sphère privée déjà protégée
par l’article 13 de la Constitution, et dans notre pays, cette
protection est relativement bien garantie. Mais à juste titre, elle
ne doit pas permettre de couvrir tous les abus de l’évasion
fiscale. Il n’y a pas besoin de changer la constitution. Que les millionnaires et
milliardaires de l’UDC souhaitent protéger les fraudeurs au fisc,
cela ne m’étonne pas. S’il était suisse, je suis sûr
que Donald Trump serait membre du comité d’initiative. Par contre, ce que j’ai la
peine à comprendre, c’est pourquoi le PLR et le PDC s’efforcent
de bricoler un contre-projet dont le seul but est d’éviter une défaite
sanglante de l’UDC devant le peuple avec son initiative pour la résurrection. À l’attention du PDC,
j’aime bien rappeler qu’il ne s’agit pas de la résurrection
au sens théologique du terme mais bien du rétablissement de
pratiques immorales et contre-productives. À l’intention du PLR,
j’aimerais rappeler que les banques elles-mêmes craignent comme
la peste de retomber dans le fléau de la fraude fiscale. On aurait
pu, de la part de ce parti, attendre un minimum de colonne vertébrale
dans ce dossier central. J’ai bien lu les explications
des journaux selon lesquelles ce serait la présence de quelques
brebis égarées du PLR et PDC dans le comité d’initiative qui
obligerait ces partis à promouvoir maintenant un
contre-projet. Mais franchement, chers collègues, devant le peuple,
personne ne s’intéresse à savoir qui était véritablement de
comité d’initiative. La question de fond, c’est de
savoir si l’on veut que nos banques et notre place financière se
développent sur des bases solides et durables, ou si on veut répéter
les grossières erreurs du passé. La réponse me paraît évidente
: il faut des bases solides et durables, c’est aussi l’avis de
la branche. Rien plus logique : nos banques
sont péniblement sorties de la boue, et elles n’ont pas envie
d’y retourner. Néanmoins, j’aimerais ici
quand même remercier le PLR et le PDC pour m’avoir permis de
vivre un événement probablement unique dans ma carrière de président
du groupe socialiste de l’assemblée fédérale : être le seul
parti gouvernemental à défendre les intérêts à long terme de la
place financière et de ses employés. Une fois de plus, vous faites
de l’aplaventrisme devant l’UDC au lieu de redresser la tête et
de défendre l’intérêt générale. C’est déplorable. Je vous remercie donc de suivre
le Conseil fédéral en recommandant le rejet de cette initiative et
en renonçant à formuler un contre-projet
|
|
Contact: Roger Nordmann, Rue de l'Ale 25, 1003 Lausanne, Twitter @NordmannRoger 1.04.2017 |