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Roger Nordmann

Conseiller national

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Article - 12 janvier 2010

LPP: les prélèvements scandaleux des compagnies d’assurance vie

Roger Nordmann

L’impact sur les retraites de la nouvelle baisse du taux de conversion soumise au peuple le 7 mars serait tout à fait substantiel, d’autant qu’une première baisse de 7,2% à 6,8% est déjà décidée. Sous l’ancien régime, un salarié qui avait épargné 200 000 francs de capital touchait annuellement 7,2% de ce capital, c’est-à-dire 14 400 francs par an. Une fois le taux de conversion abaissé à 6,4%, le même capital ne donnerait plus droit qu’à 12 800 francs par an. Ce serait donc une perte sèche de 1600 francs par an sur la rente, soit l’équivalent d’un mois et demi de rente par an.

Avant d’en arriver à une pareille extrémité, il faut avoir pris toutes les autres mesures possibles, ce qui n’est justement pas le cas. A défaut d’être parfaitement transparente et incontournable, une telle décision sape la confiance du deuxième pilier dans son ensemble. Pendant une vie entière de labeur, on promet aux salariés que l’argent épargné donnera droit à une rente X. Puis en fin partie, on change soudainement les règles du jeu en disant que la rente ne sera plus que de 89% de X.

En elle-même, l’argumentation officielle justifiant la nouvelle baisse du taux de conversion peut sembler raisonnable: «L’espérance de vie ayant augmenté, il faut servir une rente pendant un plus grand nombre d’années avec le même capital de départ, ce qui nécessite de raboter la rente mensuelle.» Cet argument souffre cependant d’un premier défaut: il a déjà servi pour justifier la dernière baisse du taux de conversion, étalée de 2005 à 2014. Rien ne justifie de surajouter une seconde baisse de 0,4% du taux de conversion d’ici à 2015. Dans l’intervalle, le vieillissement ne s’est pas brutalement accéléré.

C’est là que les partisans de la baisse avancent un second argument: «Le rendement du capital a baissé, et il n’est donc plus possible de garantir un taux technique de 3,5%. Le capital qui est encore dans la caisse après la retraite de l’assuré, parce qu’il n’a pas encore entièrement été débité en rente, rapporte moins. Il faut donc servir des tranches de rente plus fines.» Cet argument est lui aussi difficilement recevable, parce que le rendement à long terme du capital, même ces dernières années, permet d’atteindre ces 3,5%, bon an mal an.

Les partisans de la baisse doivent alors se rendre sur un troisième terrain pour tenter de justifier leur manœuvre: «Si nous ne corrigeons pas les paramètres de la LPP, la génération actuellement à la retraite ou sur le point de prendre sa retraite risque de piller les caisses au détriment des jeunes générations.» A nouveau, cet argument peut sembler tout à fait recevable, car l’équité entre générations est assurément une juste cause. Les assurés ne devraient-ils pas se consoler de cette perte en se disant que ce qui n’est pas versé sous forme de rente ira grossir les réserves des fondations LPP? Et que ces réserves permettent par exemple d’assurer l’indexation des rentes en cas d’inflation?

Ce troisième argument ne vaut que si la caisse est «étanche». Il faut en effet avoir la garantie que les montants économisés sur les rentes aillent effectivement renforcer les réserves de la fondation et ne se perdent pas ailleurs. Or, cette garantie n’est donnée que pour la moitié des assurés dont la caisse est réellement indépendante.

Pour l’autre moitié des assurés, cette garantie fait défaut. Il s’agit des personnes affiliées auprès de fondations collectives adossées à des compagnies d’assurance vie (à but lucratif, pour dire les choses poliment). Dans ce type d’institutions, ce qui n’est pas versé aux assurés sous forme de rente va, dans une très large mesure, gonfler le bénéfice de ces compagnies d’assurance vie et non pas renforcer les réserves de la fondation.

Le législateur a bien tenté en 2003 d’accroître la transparence et de limiter les prélèvements par ces compagnies, grâce à un mécanisme répondant au doux nom de «legal quote». L’idée était de limiter le prélèvement à 10% des excédents, le 90% devant rester propriété des assurés. Malheureusement, le lobby des assurances vie a persuadé le Conseil fédéral de faire une interprétation à notre avis illégale de la «legal quote»: selon l’ordonnance, les compagnies d’assurance vie peuvent prélever 10% du rendement brut, au lieu de 10% du rendement net. Leurs actionnaires y gagnent des centaines de millions, et le phénomène est aggravé par la baisse du taux minimum de rémunération.

Dans la campagne d’affiches favorable à la baisse du taux de conversion, les assureurs ne croient pas si bien dire en parlant d’un trou de 600 millions qui se creuserait annuellement. En effet, ce sont eux qui le creusent en dénaturant le mécanisme «legal quote» pour accroître leurs bénéfices. Cette différence d’interprétation représentait en effet, en 2007, la modique somme de 540 millions spoliés aux assurés. Tant que ces dysfonctionnements ne sont pas corrigés, des corrections techniques sur la LPP au détriment des assurés ne sont pas acceptables, raison pour laquelle il y a lieu de voter «non» le 7 mars.

 

 

Le Temps,  12.1.2010

 

LPP: les prélèvements scandaleux des compagnies d’assurance vie

Roger Nordmann

L’impact sur les retraites de la nouvelle baisse du taux de conversion soumise au peuple le 7 mars serait tout à fait substantiel, d’autant qu’une première baisse de 7,2% à 6,8% est déjà décidée. Sous l’ancien régime, un salarié qui avait épargné 200 000 francs de capital touchait annuellement 7,2% de ce capital, c’est-à-dire 14 400 francs par an. Une fois le taux de conversion abaissé à 6,4%, le même capital ne donnerait plus droit qu’à 12 800 francs par an. Ce serait donc une perte sèche de 1600 francs par an sur la rente, soit l’équivalent d’un mois et demi de rente par an.

Avant d’en arriver à une pareille extrémité, il faut avoir pris toutes les autres mesures possibles, ce qui n’est justement pas le cas. A défaut d’être parfaitement transparente et incontournable, une telle décision sape la confiance du deuxième pilier dans son ensemble. Pendant une vie entière de labeur, on promet aux salariés que l’argent épargné donnera droit à une rente X. Puis en fin partie, on change soudainement les règles du jeu en disant que la rente ne sera plus que de 89% de X.

En elle-même, l’argumentation officielle justifiant la nouvelle baisse du taux de conversion peut sembler raisonnable: «L’espérance de vie ayant augmenté, il faut servir une rente pendant un plus grand nombre d’années avec le même capital de départ, ce qui nécessite de raboter la rente mensuelle.» Cet argument souffre cependant d’un premier défaut: il a déjà servi pour justifier la dernière baisse du taux de conversion, étalée de 2005 à 2014. Rien ne justifie de surajouter une seconde baisse de 0,4% du taux de conversion d’ici à 2015. Dans l’intervalle, le vieillissement ne s’est pas brutalement accéléré.

C’est là que les partisans de la baisse avancent un second argument: «Le rendement du capital a baissé, et il n’est donc plus possible de garantir un taux technique de 3,5%. Le capital qui est encore dans la caisse après la retraite de l’assuré, parce qu’il n’a pas encore entièrement été débité en rente, rapporte moins. Il faut donc servir des tranches de rente plus fines.» Cet argument est lui aussi difficilement recevable, parce que le rendement à long terme du capital, même ces dernières années, permet d’atteindre ces 3,5%, bon an mal an.

Les partisans de la baisse doivent alors se rendre sur un troisième terrain pour tenter de justifier leur manœuvre: «Si nous ne corrigeons pas les paramètres de la LPP, la génération actuellement à la retraite ou sur le point de prendre sa retraite risque de piller les caisses au détriment des jeunes générations.» A nouveau, cet argument peut sembler tout à fait recevable, car l’équité entre générations est assurément une juste cause. Les assurés ne devraient-ils pas se consoler de cette perte en se disant que ce qui n’est pas versé sous forme de rente ira grossir les réserves des fondations LPP? Et que ces réserves permettent par exemple d’assurer l’indexation des rentes en cas d’inflation?

Ce troisième argument ne vaut que si la caisse est «étanche». Il faut en effet avoir la garantie que les montants économisés sur les rentes aillent effectivement renforcer les réserves de la fondation et ne se perdent pas ailleurs. Or, cette garantie n’est donnée que pour la moitié des assurés dont la caisse est réellement indépendante.

Pour l’autre moitié des assurés, cette garantie fait défaut. Il s’agit des personnes affiliées auprès de fondations collectives adossées à des compagnies d’assurance vie (à but lucratif, pour dire les choses poliment). Dans ce type d’institutions, ce qui n’est pas versé aux assurés sous forme de rente va, dans une très large mesure, gonfler le bénéfice de ces compagnies d’assurance vie et non pas renforcer les réserves de la fondation.

Le législateur a bien tenté en 2003 d’accroître la transparence et de limiter les prélèvements par ces compagnies, grâce à un mécanisme répondant au doux nom de «legal quote». L’idée était de limiter le prélèvement à 10% des excédents, le 90% devant rester propriété des assurés. Malheureusement, le lobby des assurances vie a persuadé le Conseil fédéral de faire une interprétation à notre avis illégale de la «legal quote»: selon l’ordonnance, les compagnies d’assurance vie peuvent prélever 10% du rendement brut, au lieu de 10% du rendement net. Leurs actionnaires y gagnent des centaines de millions, et le phénomène est aggravé par la baisse du taux minimum de rémunération.

Dans la campagne d’affiches favorable à la baisse du taux de conversion, les assureurs ne croient pas si bien dire en parlant d’un trou de 600 millions qui se creuserait annuellement. En effet, ce sont eux qui le creusent en dénaturant le mécanisme «legal quote» pour accroître leurs bénéfices. Cette différence d’interprétation représentait en effet, en 2007, la modique somme de 540 millions spoliés aux assurés. Tant que ces dysfonctionnements ne sont pas corrigés, des corrections techniques sur la LPP au détriment des assurés ne sont pas acceptables, raison pour laquelle il y a lieu de voter «non» le 7 mars.

 

 

Le Temps,  12.1.2010

  

 

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