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24 Heures, 2 juin 2005 L’énergie,
un défi économique et une chance pour la Suisse Cette situation ne devrait guère changer, car les exportateurs n’investissent pas beaucoup dans les capacités d’extraction. En effet, cela provoquerait dans un premier temps une baisse des prix et donc de leurs profits. Et comme les réserves de pétroles sont de toute façon limitées, des capacités d’extraction renforcées n’apporteraient qu’un soulagement temporaire pour les importateurs: en effet, si l’on extrait plus de pétrole, les réserves seront plus rapidement épuisées et l’explosion des prix reviendra au galop. Indépendamment des problèmes écologiques, cette situation pose un défi économique majeur. En 2003, la Suisse a importé pour 5,2 milliards de francs d’énergie fossile, essentiellement des produits pétroliers à un prix moyen d’environ 28 dollars US le baril. Depuis lors, le baril n’a cessé de monter pour s’établir aux alentour de 50 $ actuellement. Et banque d’affaire Goldman-Sachs estime qu’un prix de 105 $ ces prochaines années ne peut plus être exclut. La facture des importations énergétique pourrait donc rapidement avoisiner les 15 milliards de francs, car le gaz suit la même évolution. Face à cette situation, deux attitudes sont possibles : soit attendre et voir venir, soit anticiper. Attendre, c’est se dire qu’une fois que le problème sera là, on trouvera bien une solution de remplacement, sous la pression des prix. Je n’y crois pas, parce qu’il est impossible d’adapter rapidement notre consommation le jour venu. En effet, ce sont les infrastructures, les bâtiments et les équipements qui sont déterminant, et on ne les renouvelle pas si vite. En réalité, les seuls à profiter d’une explosion des prix de l’énergie seront les producteurs et les intermédiaires, qui bénéficieront d’une fabuleuse rente de situation. Raison pour laquelle ils veulent éviter que l’on anticipe le problème. A moyen terme, c’est pourtant une véritable
strangulation économique qui menace l’économie des pays énergétivores.
Pour la Suisse, le plus sage serait d’anticiper dès maintenant selon
trois axes :
Il faut un engagement volontariste de la Confédération
pour y parvenir, en taxant davantage l’énergie et utilisant cet
argent pour des programmes de modernisation des infrastructures et des
bâtiments. Pour les nouvelles énergies renouvelables, il
s’agit, dans la phase de lancement, de garantir des prix qui couvrent
la différence avec les prix du marché. C’est le modèle allemand
qui fonctionne remarquablement bien depuis cinq ans : en déclanchant
un boom dans le solaire et l’éolien (130'000 emplois crées),
la loi allemande a permis le passage à une échelle industrielle. Les
prix de fabrication des éoliennes ont baissé au point
qu’aujourd’hui, l’électricité d’origine éolienne a quasiment
rejoint les prix du marché. Tant et si bien que le vent produit déjà
4% de la consommation d’électricité outre-Rhin. En Suisse, c’est la biomasse et la géothermie qui
offrent les meilleures perspectives. La biomasse (bois, biogaz,
compost et déchets) est neutre en terme de CO2 et offre d’intéressantes
perspectives de reconversion pour l’agriculture. Et notre sous-sol
tourmenté recèle un potentiel fabuleux, tant pour chauffage à
distance que pour électricité, via des turbines à vapeur pressurisées.
C’est ainsi qu’à Bâle, il se creuse actuellement un forage géothermique
qui permettra de couvrir les besoins de chauffage et d’électricité
de 5000 ménages. En plus de nous protéger de l’explosion des prix du
pétrole, ces développements permettraient de créer de nombreux
emplois en Suisse même, dans des secteurs technologiques prometteurs.
Allons nous vraiment attendre les bras croisés ?
24 Heures, 2 juin 2005
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Contact: Roger Nordmann, Rue de l'Ale 25, 1003 Lausanne, Twitter @NordmannRoger 1.04.2017 |