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Article Service de presse du PSS, 2 mai 2005
Après
Avanti, le droit du bail, l’AVS et le paquet fiscal... l’électricité
?
Le compromis de la commission d’experts qui avait été
mandatée par Moritz Leuenberger avant qu'il ne soumette au Conseil fédéral
un projet de nouvelle loi sur l'approvisionnement en électricité
(LApEl) représente une ligne rouge dont le franchissement provoquerait
à coup sûr un référendum. C’est malheureusement l’issue qui se
dessine actuellement, à l’issue des travaux de la commission préparatoire
du Conseil national. Ce scénario rappelle furieusement d’autres dossiers
dans lesquels le Parlement a exercé une surenchère néfaste, tels
Avanti, le droit du bail, la 11ème révision de l’AVS et le paquet
fiscal. Dans les semaines qui viennent, la politique énergétique
constituera un test sur l’existence d’une droite modérée, disposée
à chercher des solutions médianes sur la base du résultat des votes
populaires. Après le rejet de la loi sur le marché de l’électricité
(LME) le 22 septembre 2002, une commission d’experts avait proposé
un compromis. Celui-ci consistait à ouvrir le marché en deux étapes,
la première limitant le segment libéré aux entreprises qui
consomment plus de 100 MWh par an. L’ouverture totale pour toutes les
entreprises et les ménages, 5 ans plus tard, aurait été soumise au référendum
facultatif. Contre l’avis du DETEC, le Conseil fédéral avait
apporté la première égratignure au compromis en proposant un
libéralisation immédiate pour toutes les entreprises. Fermement
lobbysée par les grandes entreprises électriques et economiesuisse,
la Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de
l'énergie du Conseil national (CEATE) a ensuite choisi une libéralisation
totale, en supprimant l’étape intermédiaire. Cette décision extrême pose des problèmes pratiques
à de nombreux fournisseurs, qui devront sans délai mettre en place
une bureaucratie commerciale et un arsenal de marketing. Les expériences
très mitigées faites à l’étranger, où les prix sont rapidement
remontés après une baisse initiale, incitaient en outre à plus de
prudence, ce que même le Conseil fédéral admettait en maintenant les
étapes. L’idée de la commission d’experts consistait à poser un
cadre légal – qui fait défaut actuellement – et à ouvrir
formellement le commerce de gros. Cette solution aurait permis de résoudre
les problèmes urgents, à savoir l’absence d'une base légale pour
l’unification du réseau à très haute tension, d'un cadre pour les
investissements et d’un dispositif moderne de promotion des énergies
renouvelables. Après 5 ans, il restait possible de renoncer à la libéralisation
totale et de garder une solution intermédiaire offrant une bonne sécurité
aux consommateurs. S’agissant d’un pas important en direction du
marché, cette première étape représentait l’extrême limite de ce
qui était acceptable pour l’Union syndicale suisse (USS), en sa
qualité de représentante des référendaires de 2002 au sein de la
commission d’experts. Le domaine de l’acheminement de l’électricité,
qui représente 2/3 des coûts, demeure en effet un monopole naturel.
Vouloir le libéraliser à tout prix nécessite de mettre sur pied une
armada législative pour tenter de contenir les nombreuses dérives :
ententes cartellaires, sous-investissement et sous-entretien, rente
oligopolistique excessive, etc. Et, à cet égard, le projet des
experts comportait déjà de nombreux inconvénients, notamment parce
que le régulateur sera en position de faiblesse et parce que le
surveillant des prix ne sera plus compétent. Lors de la dernière séance de CEATE-N, mardi 26
avril, une lueur d’espoir s’est cependant allumée, en ce sens
qu’il s’est trouvé une majorité pour renforcer et accélérer la
promotion des énergies renouvelables. L’option retenue imite en
partie l’excellente législation allemande, laquelle prévoit la rétribution
d’injection couvrant les coûts pour le courant renouvelable. La
question des mesures d’économie d’énergie n’a pas encore été
traitée. Si les bourgeois sont sincères sur la question
environnementales, ils feraient bien de revenir au compromis des
experts pour éviter que ces progrès – insuffisants sous l’angle
environnemental – ne chutent avec le référendum sur la libéralisation.
Mais s’il s’agit uniquement de répéter la manœuvre de la LME, à
savoir tenter d’acheter le camps rose-vert avec des modestes
concessions en matière d’énergie renouvelable, cela ne fonctionnera
pas. Car forts du refus de la libéralisation par le peuple il y a
moins de trois ans, le PS, les Verts et les syndicats seront plus que
jamais légitimés à lancer un référendum et à le gagner, sur la
base d’excellents arguments économiques dont la pertinence n'a fait
que se renforcer au fil du temps. Les débats à venir seront donc une occasion de vérifier s’il existe encore dans ce parlement des forces bourgeoises modérées et raisonnables, capable de respecter la volonté populaire et de faire aboutir des compromis. Service de presse du PSS, 2 mai 2005
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Contact: Roger Nordmann, Rue de l'Ale 25, 1003 Lausanne, Twitter @NordmannRoger 1.04.2017 |