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Article 24 Heures, 14 août 2004 Mécanisme
d'assainissement: Oui,
la Constitution est respectée, M. Leuba ! Gérard Bühlmann et Roger Nordmann, anciens
membres de l’Assemblée constituante. Ancien co-président de l’assemblée Constituante,
M. Jean-François Leuba affirme dans ces colonnes que le Conseil
d’Etat viole la Constitution avec son plan d’assainissement. En
substance, M. Leuba reproche au Conseil d’Etat de proposer au Grand
Conseil parmi d’autres mesures quatre hausses d’impôt ciblées
dans le cadre du dispositif d’assainissement. Selon la Constitution,
le peuple aura effectivement à choisir entre ces quatre mesures
fiscales ciblées et quatre hausses équivalentes du coefficient
cantonal, qui toucheraient elles tous les contribuables. A l’appui de ses accusations, M. Leuba affirme que
le texte ne permet pas choisir des hausses d’impôt ciblées pour les
opposer ensuite à une hausse coefficient cantonal. Pourtant,
l’article 165 de la Constitution a le libellé suivant: 1 Si, dans les derniers comptes, les recettes
ne couvrent pas les charges avant amortissements, les autorités
cantonales prennent sans délai des mesures d'assainissement portant
sur le montant du dépassement. 2 Les mesures qui nécessitent des modifications de
rang législatif sont soumises au vote du corps électoral. Pour
chacune de ces mesures, le vote oppose la modification législative
proposée à une augmentation du coefficient de l'impôt cantonal
direct d'effet équivalent. Les mots parlent d’eux-mêmes : une « mesure
d’assainissement » vise à réduire le déficit. En pratique,
la réduction du déficit peut être atteinte en diminuant, ou
reportant sur d’autres collectivités, les dépenses ou en augmentant
les recettes, voire par une combinaison de ces mesures. Ainsi, une
« mesure d’assainissement » peut agir soit sur les
recettes, soit sur les dépenses. Si l’assemblée Constituante avait
voulu limiter l’application du mécanisme à la seule diminution des
dépenses, elle l’aurait dit clairement et aurait choisi pour cela
les termes « mesures d’économie ». L’analyse historique des débats de la Constituante
amène à la même conclusion : la droite préconisait de se
limiter à des mesures d’économies, alors que la gauche ne voulait
pas de mécanisme automatique. Dans un esprit civique, un compromis a
été discuté et trouvé autour de la table de négociation par les
deux soussignés ainsi que Messieurs Luc Recordon et … Jean-François
Leuba lui-même. Principale concession de la gauche :
l’existence même d’un mécanisme contraignant ; principale
concession de la droite : l’expression « mesures
d’assainissement » qui ouvre la porte à de nouvelles recettes
sous forme de taxes ou d’impôts spécifiques, étant admis que
politiquement ces mesures sont discutables car elles limitent la liberté
de choix de l’électeur. C’est donc en toute connaissance de cause
que l’expression « mesures d’économie » n’a pas été
retenue. Monsieur Leuba a par contre raison sur un point :
un gouvernement extrémiste de gauche pourrait théoriquement assainir
les finances uniquement par des hausses d’impôts ciblées, alors
qu’un gouvernement extrémiste de droite pourrait, tout aussi théoriquement,
assainir les finances uniquement en imposant des économies ciblées.
Mais le Constituant a supposé le bon sens et la responsabilité
politique des autorités. La pratique lui donne raison : dans le
cadre du mécanisme d’assainissement, le gouvernement de
centre-droite propose quatre mesures fiscales pour 52 millions et des réductions
de dépenses pour 119 millions. Un gouvernement de centre-gauche aurait
vraisemblablement proposé une autre répartition ; en définitive,
c’est le Grand Conseil qui décidera. Les graves déficits du Canton de Vaud ne sont pas
tenables à long terme. L’article 165 de la constitution a contraint,
enfin, le gouvernement à agir. En quatorze années de déficits,
c’est la première fois que des mesures véritablement substantielles
et crédibles sont proposées. A nos yeux, le projet du Conseil
d’Etat est conforme à l’esprit de l’article 165 et il navrant de
constater que les milieux qui réclament le plus vigoureusement la réduction
du déficit s’efforcent maintenant de mettre les bâtons dans les
roues de l’assainissement à coup de conférences de presse, d’avis
de droits et de menaces de recours au Tribunal fédéral.
24 Heures, 14 août 2004
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Contact: Roger Nordmann, Rue de l'Ale 25, 1003 Lausanne, Twitter @NordmannRoger 1.04.2017 |