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Article Domaine Public, 25 juin 2004 Finances cantonales vaudoises : Quelques repères avant les débats de l'automne En 2003, le déficit de fonctionnement du canton de Vaud s'est élevé à 385 millions, au lieu des 157 budgétés. Entièrement imputable aux recettes, ce mauvais résultat s'explique par la faiblesse conjoncturelle et le fait que l'Etat a été victime d'un «trou d'air» ponctuel dans l'encaissement. Le passage à la taxation post-numerando et diverses réorganisations propres à 2003 dans le domaine des successions, mutations et des gains immobiliers lui ont fait perdre plus de 100 millions, dont une part non négligeable réapparaîtra dans les comptes 2004. Structurellement, le déficit de l'Etat de Vaud se situe donc vraisemblablement aux alentours de 250 millions.
Après les rejets bienvenus du paquet fiscal et de l'initiative libérale sur les successions, la situation est cependant loin d'être dramatique. En effet, l'Etat est capable d'assumer des tâches de plus en plus lourdes (scolarité, personnes âgées) tout en encaissant des coups durs comme l'affaire de la Banque cantonale vaudoise. Cette capacité est d'autant plus remarquable que la fiscalité est en très légère baisse. En 2000-2001, les recettes des impôts cantonaux et communaux représentaient 15,9 % de l'ensemble des richesses produites en une année dans le canton, alors qu'en 1989-1990, ce pourcentage était encore de 16,7% (Numerus 6/2003). Le caractère légèrement bénéficiaire du budget d'investissement en 2003 (+ 22 millions) relativise la gravité du déficit de fonctionnement. Si l'Etat a beaucoup emprunté pour les dépenses courantes, il n'a en revanche pas dû contracter de dette pour investir !
Toutefois la menace la plus sournoise réside dans la dépendance croissante de l'Etat envers les recettes non-fiscales. En 2003, celui-ci n'encaissait que 3,7 milliards de recettes fiscales et parafiscales, mais dépensait à peine plus de 6 milliards de francs. En dix ans, la part des recettes fiscales et parafiscales passe de 83% à 61% des dépenses (cf. graphique).
Le canton est donc exposé davantage à la variation des recettes non-fiscales, soit essentiellement les contributions de la Confédération, des cantons, des communes. Vu sous un autre angle, l'Etat de Vaud, autrefois si fier, devient de plus en plus une entité qui fournit des services pour d'autres collectivités publiques. Ce phénomène érode indubitablement sa marge décisionnelle. En sus, il expose l'Etat de Vaud aux aléas de la politique de report de charges menée par la Confédération. Le transfert d'un certain nombre de points d'impôt des communes à l'Etat au 1er janvier 2004 fait remonter la part des recettes fiscales et parafiscales à 70% environ, mais il n'est pas certain que le phénomène soit durablement endigué.
Le mécanisme constitutionnel d'assainissement Le mécanisme d'assainissement prévu à l'article 165 la nouvelle Constitution vaudoise s'enclenche lorsque le déficit de fonctionnement est supérieur au montant des amortissements comptables. En deçà de ce seuil, appelé «petit équilibre», l'Etat emprunte des liquidités pour financer les dépenses courantes. A la publication des comptes 2003 ce printemps, le canton se trouve justement dans ce cas de figure, puisque le déficit de 385 millions est supérieur au montant des amortissements, lesquels s'élèvent à 223 millions. Le Conseil d'Etat a donc l'obligation de proposer sans délai des mesures d'assainissement, nouvelles recettes ou réductions des dépenses, pour 162 millions. Lorsque ces mesures sont de type législatif, la Constitution prévoit que le peuple est appelé à trancher séparément entre chacune des mesures et une hausse du taux d'impôt cantonal avec un effet équivalent. A titre d'illustration, le peuple devra répondre à plusieurs questions du type : «Préférez-vous la suppression de la première enfantine ou l'augmentation de 2 points du taux cantonal ? Préférez-vous un renforcement du barème de l'impôt sur la fortune ou l'augmentation de 1 point du taux cantonal ?» Pour chaque question, le peuple est obligé d'accepter l'une des mesures, car le mécanisme exclut le statu quo. A cet égard, de sérieux doutes, déjà soulevés lors des travaux de la Constituante, entachent l'admissibilité de ce dispositif. En effet, l'impossibilité de choisir le statu quo paraît difficilement compatible avec l'expression fidèle et sûre de la volonté des électeurs, qui est un droit fondamental garanti par l'article 34 de la Constitution fédérale.
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Contact: Roger Nordmann, Rue de l'Ale 25, 1003 Lausanne, Twitter @NordmannRoger 1.04.2017 |