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A quand une association nationale de défense
des assurés ?
Les
locataires, les salariés, les consommateurs et les patients, mais
aussi les propriétaires et les différentes branches économiques sont
groupés en associations. Ce mode d’organisation n’est pas le fruit
du hasard : il permet à chaque catégorie de défendre ses intérêts,
mais aussi de régler un certain nombre de problèmes directement avec
la catégorie « d’en face ». Par exemple, les
associations vaudoises de locataires et de propriétaires se sont récemment
entendues pour établir un code sur les règles et usages locatifs.
Le
domaine des assurances constitue une exception à cette logique
paritaire. L’Association suisse d’assurance, qui regroupe les
assureurs privées, n’a pas face à elle une grande organisation
nationale regroupant les assurés. Il existe bien de petites
associations locales, mais pas d’organisation faîtière de défense
des assurés. Pourtant, le besoin d’une telle association est criant.
Prenons
l’exemple du 2ème pilier. En moins d’un an, nous
assistons à la troisième vague de réduction des prestations. Après
avoir réduit une première fois le taux minimum de rémunération du
capital assuré de 4% à 3,25% au début de cette année, le Conseil fédéral
a annoncé une seconde réduction de ce taux à 2%.
Enfin, à fin juin, les trois plus grandes assurances (Zürich,
Winterthur, Rentenanstalt) ont décidé unilatéralement réduire les
prestations d’assurances pour la partie du 2ème pilier
qui dépasse le strict minimum légal. Comme la plupart des employeurs
assuraient un second pilier un peu plus généreux que ce minimum, tous
les assurés qui sont affiliés en LPP auprès de ces assurances sont
touchés par des réductions qui peuvent atteindre 20%.
L’effondrement
de la bourse a suscité un mouvement de panique, et certains
ajustements se justifiaient peut-être dans un contexte
d’augmentation de l’espérance de vie. Mais après avoir pendant
des années engrangé des bénéfices mirobolants,
les assureurs profitent de l’occasion pour se tailler un cadre
législatif et contractuel qui ne sert que leurs intérêts. Depuis
mars, la bourse a redémarré. Mais n’existe hélas aucun lobby pour
rappeler aux assureurs que, selon l’indice Pictet, les caisses de
pension ont atteint un rendement moyen de presque 5% depuis le 1er
janvier de cette année, voire carrément de 6% si elles détiennent
40% d’actions.
Le
domaine de la LPP est très révélateur de la complexité du domaine,
parce qu’il est à cheval entre les assurances sociales et les
assurances privées. Mais il n’est pas le seul où les assurés mériteraient
d’être mieux défendus. Dans l’assurance maladie, les caisses ont
réussi à imposer au Parlement de réduire le libre choix du médecin,
tout en maintenant l’opacité sur leurs dépenses de fonctionnement
et de publicité.
Dans
les contrats d’assurance privée la station est encore pire :
l'assureur peut invoquer une petite erreur ou un oubli anodin commis
par l'assuré lorsqu'il a rempli le questionnaire de santé, et refuser
toute prestation, même si cette erreur n'a rien à voir avec le
sinistre. P.ex. l'assureur peut refuser une prestation pour un accident
à la cheville en invoquant qu'une broncho-pneumonie vielle de dix ans
a été passée sous silence !
Mais
les assureurs ne sont pas les seuls à avoir un comportement discutable :
que dire de la pratique qui consiste à se servir de
l’assurance-invalidité pour se débarrasser d’employés à la
première difficulté venue? Ou encore de l’accumulation de petites
escroqueries à l’assurance, commises par des gens qui croient ainsi
« rentabiliser leurs primes », mais qui ne font en réalité
que renchérir indirectement les primes des assurés honnêtes ?
Ces
quelques exemples montrent que ce n’est pas le pain qui manquerait
sur la planche d’une association nationale de défense des assurés
honnêtes. Les ménages consacrent en moyenne 20,7 % de leurs dépenses
aux assurances sociales et privées. Cela justifierait donc amplement
la création d’une association sur le modèle de la Ligue allemande
des assurés, forte de plus de 100'000 membres. 24 Heures, 24 juillet 2003
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Contact: Roger Nordmann, Rue de l'Ale 25, 1003 Lausanne, Twitter @NordmannRoger 1.04.2017 |