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Article 24 Heures, 28.3.03 Pour une répartition équitable du fardeau Roger Nordmann, Coprésident du Comité vaudois « La santé à un prix abordable », 28 mars 2003 Les primes d'assurance maladie atteignent désormais un niveau insupportable: une famille vaudoise moyenne (deux enfants, dont l'un de plus de 18 ans, et 60 000 fr. de revenu annuel) consacre 18% de son revenu aux primes d'assurances maladie. Face à cette situation, deux visions s'affrontent. La première, émanant de l'UDC et de Santésuisse, propose de réduire fortement les prestations couvertes par l'assurance de base. Chacun pourrait conclure une assurance privée s'il entend bénéficier de prestations de qualité en cas de pépin de santé. Reflétant le risque individuel, les primes atteindraient un niveau exorbitant pour les personnes âgées ou en mauvaise santé. Sous ce régime, les catégories fragiles et les familles devraient renoncer à une assurance complète, faute de moyens financiers. Au final, plus de la moitié de la population devrait se contenter de soins minimums, comme c'est aujourd'hui le cas en Angleterre et aux Etats-Unis. Seuls les plus aisés, c'est-à-dire essentiellement les jeunes célibataires et les couples sans enfants, pourraient se payer l'accès aux meilleurs soins. Dans ce scénario, le seul avantage de la LAMal — l'accès à des traitements de qualité pour toutes et tous — serait perdu. Et les grands gagnants seraient les assureurs privés et les cliniques privées. L'autre vision est celle de l'initiative « Pour une santé à un prix abordable », sur laquelle nous voterons le 18 mai. Cette initiative vise à maintenir l'accès à des soins de bonne qualité pour toutes et tous. Pour que le niveau des primes redevienne supportable, l'initiative propose de remplacer les primes individuelles fixes par une prime familiale dépendant du revenu. En cas d'acceptation de l'initiative, la prime vaudoise s'élèverait à 5% du revenu imposable, quel que soit le nombre de personnes à assurer dans le ménage. Pour éviter de concentrer tout l'effort sur le revenu, deux sources complémentaires sont prévues: une augmentation de 1,5% de la TVA (mais seulement de 0,4% pour l'alimentation), et un prélèvement sur la fortune nette supérieure à un million. Pour la famille de quatre personnes évoquée ci-dessus, l'effet conjugué de la disparition des anciennes primes, de la nouvelle prime et de la TVA est spectaculaire: elle verrait son fardeau divisé par trois (pour autant que sa fortune soit inférieure au million). Par rapport aux primes actuelles, un couple sans enfant bénéficierait d'un allégement aussi longtemps que son revenu imposable est inférieur à 140 000 fr. par an. Quant à un célibataire, il y gagnerait pour autant que son revenu annuel soit inférieur à 80 000 fr. Ceux dont le revenu est juste trop élevé pour bénéficier des subsides actuels seront les principaux bénéficiaires de l'initiative « Pour une santé à un prix abordable ». Cette dernière soulage donc la classe moyenne. En raison du vieillissement et du progrès médical, les coûts de la santé vont continuer d'augmenter. Seul un improbable changement de philosophie face à la maladie et à la mort pourrait inverser le courts des choses. Mais du moment que la plupart d'entre nous désirent bénéficier des meilleurs soins possible, il n'est ni étonnant ni choquant que la santé absorbe au total 10% du produit intérieur. La fourniture de soins nécessite en effet beaucoup de personnel. Et n'oublions pas l'autre côté de la médaille: la santé fournit beaucoup d'emplois. En préconisant une répartition plus équitable du fardeau, l'initiative « Pour une santé à un prix abordable » est réaliste: elle refuse de céder au simplisme d'une baisse des coûts qui ne s'est vérifiée dans aucun pays. Calculer les primes en fonction du revenu, comme le préconise l'initiative, n'est plus seulement une question d'équité ; c'est devenu une question de survie économique pour la classe moyenne. Si cette initiative est rejetée, on s'achemine, sous la houlette de M. Couchepin, de l'UDC et de Santésuisse, vers une réduction des prestations. Car la seule certitude, c'est le statu quo n'est plus viable longtemps. é Voir www. 24 heures. ch rubrique Comparis pour calculer sa nouvelle prime avec l'initiative. 24 Heures, 28.3.03
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Contact: Roger Nordmann, Rue de l'Ale 25, 1003 Lausanne, Twitter @NordmannRoger 1.04.2017 |