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Article : Domaine Public, 10 septembre 99 Abolition de l'impôt sur les successions: à Zurich, un héritier ne paiera plus d'impôts Par Roger Nordmann, 10 septembre 1999 Après de nombreux cantons suisses, Zurich vient de supprimer l'impôt sur les successions. Le manque à gagner est important pour les finances cantonales. Et les arguments antifiscaux sont injustifiés. A une majorité de 82 contre 81 voix, le Grand conseil zurichois vient de réduire de deux tiers limpôt sur les successions et donations, ce quil avait encore refusé en mai (voir encadré). Sous réserve de lissue de la votation populaire, les héritiers en ligne directe seront désormais exemptés dimpôt en cas de succession. Lorsque lobjet de lhéritage est un entreprise, un rabais de 80% sera accordé. Zürich était le dernier rempart contre la tendance à labolition de limpôt sur les successions en ligne directe. Les héritages aux enfants sont pas ou plus imposés dans les cantons dUri, Obwald, Nidwald, Zug, Fribourg, Soleure, Schaffouse, Appenzell Rhodes extérieures, St-Gall, Argovie, Valais, Neuchâtel et Lucerne (à lexception de la ville). Lexemption est également en discussion à Glaris. La pression des abolitionnistes va donc sûrement augmenter encore dans les autres cantons. Pour Vaud et Genève, les conséquences dune telle abolition seraient dramatiques. Dans le canton de Vaud, le produit de cet impôt est budgeté aux alentours de 100 millions. De plus, un rendement exceptionnel est le principal facteur de la relative embellie des comptes des deux cantons lémaniques en 1998. Manque de sérieux A Zürich, lors de la débat parlementaire de mai, il sétait trouvé un certain nombre de députés pour réexhumer la courbe de Laffer, du nom de lune des égéries de Ronald Regan. Ils affirmaient que la suppression de limposition des successions allait amener de largent dans les caisses de lEtat, en provoquant limmigration de riches contribuables âgés. M. Honegger, qui était alors directeur radical des finances, avait alors démonté quil faudrait larrivée improbable de 1'400 personnes dont les revenus imposables dépassent le million pour compenser le manque à gagner. Cela présupposerait une vague sans précédent de personnes préoccupées par loptimisation fiscale de leur décès au point de déménager malgré leur grand âge. Limpôt le plus juste La Conseillère aux Etats radicale Vreni Spoerri elle-même sétait encore récemment opposée à labolition de cet impôt, notamment pour des considération de justice. Dans une philosophie libérale de relative dégalité des chances à la naissance, il saute aux yeux que les héritages sont un facteur important de distorsion. Il est donc assez logique que la collectivité prélève une partie de cette manne, ce dautant plus que le bénéficiaire na aucun mérite à hériter. Les arguments anti-fiscaux habituels, selon lesquels une fiscalité marginale trop élevée - « confiscatoire » sans le langage de ces milieux - décourage la production de richesse et affaiblit léconomie, ne sont pas pertinents en loccurence. On sait en effet que la richesse héritée ne dépend en rien de la sueur, des talents ou de la motivation du bénéficiaire. Un autre argument des abolitionnistes, celui du manque de liquidités de lhéritier, paraît faible. Il est en effet possible dhypothéquer des immeubles ou de vendre des paquets dactions pour payer limpôt dû. Si les héritiers étaient dans une situation aussi défavorable que ne la dépeint lUDC, gageons que davantage de gens utiliseraient la possibilité légale consistant à refuser un héritage. Un palliatif à la non imposition des gains en capitaux A Zurich, les abolitionnistes ont même prétendu que limposition des héritages était injuste. Il y aurait selon eux double imposition, dans la mesure cet argent ferait déjà lobjet de prélèvements par le biais de limpôt sur le revenu. Cet argument est totalement infondé, puisque cest lhéritier et non le défunt qui paye limpôt. Pour le bénéficiaire, cest même linverse qui est vrai : en labsence de fiscalité sur les héritages, le bénéficiaire reçoit de largent qui échappe à tout impôt, puisque ces montants ne sont pas soumis à limpôt sur le revenu. Comme les gains en capitaux sont devenus la principale source daccroissement de la fortune, il est raisonnable de considérer que la taxation des héritages constitue un palliatif - certes post mortem - à labsence dimposition sur les gains en capitaux. Dans le contexte deffritement évoqué au début de cet article, linstauration dun tel impôt au niveau fédéral serait logique. Par rapport à limpôt sur les gains en capitaux, il offre lavantage dêtre plus simple à appliquer et probablement plus résistant à la fraude.
Encadré Le slalom des bourgeois. En mai dernier, le Grand Conseil avait refusé de réduire limposition des successions. Les radicaux sy étaient opposés avec véhémence, appuyant en cela leur coreligionnaire en charge du département des finances, M. Honegger. Ils affirmaient alors que les finances cantonales ne supporteraient pas un tel rabais et que cet impôt était équitable. Ils craignaient également quun tel pas ne conduise finalement à une augmentation de limpôts sur le revenu, à leurs yeux nettement plus défavorable à « lattractivité fiscale » du canton. Trois mois plus tard, ces mêmes radicaux sont passés avec armes et bagages dans lautre camps, ce qui a permis le revirement du législatif. La récente victoire électorale de lUDC, qui a conquis 60 sièges sur 180 au Grand Gonseil, essentiellement au détriment des radicaux, nest pas étrangère à cette volatilité radicale, ce laveu même de ces derniers. Le fait que le nouveau directeur des finances, lUDC Huber, se soit opposé avec véhémence - mais sans succès - à la cette abolition, nest que la cerise sur le gâteau: on sait en effet que lUDC zuchichoise a axé toute sa campagne en vue des élections cantonales de ce printemps sur le thème dune baisse de 20% de la fiscalité et des dépenses publiques. Domaine Public, 10 septembre 99
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Contact: Roger Nordmann, Rue de l'Ale 25, 1003 Lausanne, Twitter @NordmannRoger 1.04.2017 |